Article 14/Mal de dos, mal de l'âme ?

Publié le par Posturoptimiste

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Article 14/Mal de dos, mal de l'âme ?

En 1862, l'égyptologue Edwin Smith achetait à Louxor, en Haute Égypte, un curieux papyrus remontant à 1 500 ans avant Jésus-Christ. On allait découvrir qu'il s'agissait en fait d'un traité de médecine, considéré encore aujourd'hui comme le plus ancien écrit chirurgical existant.


Le papyrus d'Edwin Smith décrit 48 histoires de cas en des termes très précis. La dernière a trait à un mal de dos aigu. C'est dire que ce problème de santé, qu'on associe de nos jours au travail, frappait déjà les Égyptiens il y a des millénaires. Sur le document, on peut lire ceci : « Traitement. Le sujet doit être couché sur le dos; il faut lui faire... » La suite demeurera à jamais inconnue, le texte s'arrêtant à ce point culminant. Le papyrus est resté enfoui dans la tombe de son auteur pendant près de 3 500 ans.

Les pharaons ont disparu, mais le mal de dos est resté. Il fait toujours partie de la condition humaine et n'épargne personne. Dans toutes les cultures et depuis longtemps, hommes, femmes et enfants ont été affectés par des douleurs à la colonne vertébrale.

Le mal irradie parfois jusqu'aux extrémités des membres, génère beaucoup de souffrance et limite considérablement les activités. Ce problème, qui affecte le plus souvent les régions les plus mobiles de la colonne vertébrale (cervicale et lombaire), afflige environ 85 p. 100 de tous les individus au cours de leur vie, le plus souvent entre 35 et 55 ans.

Il s'agit du deuxième plus fréquent motif de consultation médicale après les affections des voies respiratoires supérieures comme le rhume et la sinusite. C'est également la toute première cause de limitation d'activités chez les adultes de moins de 45 ans et la seconde, après l'arthrite, chez les 45 à 65 ans.

Aux États-Unis, on estime le coût annuel total du mal de dos à plus de 100 milliards de dollars américains, incluant les frais indirects comme la perte de productivité pour les entreprises.


Au Canada, toutes proportions gardées, les coûts associés sont aussi très élevés. La situation se répète un peu partout dans les pays industrialisés où les dépenses associées au mal de dos augmentent de façon vertigineuse depuis plusieurs années, plus rapidement que pour toute autre cause d'incapacité.


Chez les travailleurs, environ 80 p. 100 de ces dépenses sont imputables aux problèmes les plus sévères qui nécessitent une absence du travail pendant six mois et plus, c'est-à-dire environ 10 p. 100 de tous les cas.

S'agit-il là d'un héritage des temps modernes ? Non.


Rien n'indique que le mal de dos soit plus ou moins fréquent aujourd'hui qu'au siècle dernier. Les chercheurs qui en ont estimé l'incidence depuis plusieurs décennies ont observé des taux stables.


Mais quelque chose a changé : dans les pays développés, les incapacités et les demandes de compensation financière pour maux de dos ont connu une telle augmentation chez les travailleurs et travailleuses qu'il n'est pas du tout exagéré de parler d'une véritable épidémie. Cette situation fait l'objet de recherches de plus en plus nombreuses, qui, si elles n'ont pas encore révélé toutes les causes du mal et de ses conséquences, ont cependant permis de mieux comprendre le problème et d'en améliorer le traitement.

Voici ce que l'on sait aujourd'hui...........


Le mal de dos est parfois, mais très rarement (dans environ 1 p. 100 des cas) causé par une tumeur, une infection rachidienne ou une maladie arthritique inflammatoire.


Dans la très grande majorité des cas, cependant, il s'agit d'un problème non spécifique, c'est-à-dire d'une douleur dont l'origine exacte ne peut être déterminée. Pour les patients, comme pour tous les intervenants, cette incertitude est évidemment insécurisante, et elle a donné lieu à de nombreuses pratiques fondées sur toutes sortes d'hypothèses qui ne reposent souvent sur aucune base scientifique.


C'est ainsi qu'on croit régulièrement, à tort, que le mal de dos est principalement dû à une dégénérescence ou à une quelconque malformation osseuse, ou encore, au déplacement d'un disque intervertébral.


Des études récentes ont clairement démontré que, la plupart du temps, les examens radiologiques sont inutiles : alors qu'on trouve des anomalies radiologiques chez beaucoup de personnes qui n'ont pas mal au dos, ces signes sont souvent absents chez les personnes qui en souffrent.

Dans l'état des connaissances actuelles, il faut considérer le mal de dos plus comme un problème de douleur que comme un problème anatomique.


La douleur serait déclenchée par un traumatisme anatomique, comme une entorse. Le dos compte beaucoup de ligaments! Dans la très grande majorité des cas, il suffit de réduire temporairement ses activités habituelles (mais jamais plus de deux ou trois jours de repos au lit), d'utiliser des médicaments anti-inflammatoires et des analgésiques, et de faire preuve de beaucoup de patience pour venir à bout du problème en quelques semaines.


Pour 8 à 10 p. 100 des sujets, cependant, la douleur persiste et peut devenir chronique. Se développe alors un véritable syndrome douloureux qui n'a plus rien à voir avec la blessure.

Deux éminents chercheurs de l'Université McGill, Ronald Melzack et Patrick Wall, ont élaboré dans les années 1960, la théorie dite du « portillon ». En bref, cette théorie stipule que la perception de la douleur par le cerveau est modulée par des messages provenant autant de la périphérie que du système nerveux central. Le portillon se situerait au niveau de la corne dorsale de la moelle épinière, là où entrent les fibres nerveuses responsables de la transmission des messages de douleur au cerveau, qui les interprète.


Dans certaines circonstances, le portillon pourrait carrément se fermer pour bloquer le message douloureux (chez un athlète pendant une compétition, par exemple), alors que dans d'autres, il s'ouvrirait tout grand. Le sujet percevrait alors une douleur importante sans qu'il y ait de dommage anatomique proportionnel. C'est sur ce mécanisme que repose le principal modèle actuellement utilisé pour expliquer le mal de dos chronique.

De nombreuses études ont mis en lumière le rôle de facteurs physiques comme la manutention de charges lourdes et l'exposition à des vibrations du corps entier en relation avec le mal de dos. Ces facteurs n'expliquent qu'en partie, toutefois, l'apparition du problème et l'ampleur de ses conséquences.


L'environnement psychosocial de travail, les antécédents médicaux, le tabagisme, la sédentarité et le fait d'avoir de jeunes enfants pourraient aussi intervenir. Mais aucun de ces facteurs n'est déterminant lorsque considéré seul.


Le mal de dos est maintenant reconnu par la communauté scientifique comme un problème de santé lié à plusieurs facteurs autant physiques et biologiques que psychologiques et sociaux.

Comme environ 90 p. 100 des personnes récupèrent en quelques semaines et que les efforts pour prévenir le mal de dos à la source n'ont jusqu'ici pas porté fruit, c'est vers la prévention de la chronicité, le cœur du problème, que les efforts de recherche sont maintenant majoritairement dirigés.


On cherche ainsi des caractéristiques qui permettraient de repérer précocement les cas les plus susceptibles de devenir chroniques (comme la fièvre est un signe de la gravité d'une infection).


Cela permettrait d'intervenir rapidement et de façon plus spécifique, avant que le cercle vicieux de la douleur ne s'installe à demeure. Étant donné les coûts humains et sociaux associés au mal de dos chronique, cet objectif est devenu extrêmement important et constitue sans aucun doute une véritable quête du Saint-Graal pour les chevaliers de la recherche en ce domaine.


À ce jour, on sait que les caractéristiques les plus intéressantes sont de nature psychologique comme des symptômes de dépression, des signes de détresse possiblement des conséquences du mal de dos.


Clermont Dionne  


source: http://www.acfas.ca/concours/eureka01/dionne.html

Publié dans malaudos

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M
<br /> <br /> super blog<br /> <br /> <br /> <br />
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